La Française qui nous offre l’Afrique
Le site d’informations ivoirien www.abidjan.net publie le 09 juin 2012 suivant un communiqué transmis à l’Agence française de Presse le même jour une information relative à une commission rogatoire lancée contre l’écrivaine française d’origine camerounaise Calixthe Beyala pour recel de fonds volés ou détournés et blanchiment de capitaux durant la crise ivoirienne de 2010-2011, une somme de plus de 134 millions FCFA (205.000 euros), prélevée dans des banques ivoiriennes sur ordre d’une fille de l’ancienne première dame ivoirienne Simone Gbagbo, pour le règlement de prétendus droits d’auteur à l’écrivaine.
Une information à prendre avec des pincettes, quand on connaît le zèle dont fait preuve depuis son intronisation le président ivoirien Alassane Ouattara pour diaboliser et neutraliser tous les adeptes de son plus grand ennemi, Laurent Gbagbo l’ancien chef d’Etat ivoirien. Mais une information qui vient plus ou moins confirmer le doute qui a plané sur le farouche engagement de l’écrivaine dans sa défense sans faille de Laurent Gbagbo depuis les élections présidentielles en novembre 2010 jusqu’à l’arrestation de ce dernier le 10 avril 2011.
Calixthe Beyala est connue dans l’opinion africaine. Très connue. Eternelle présente aux débats africains sur les plus grands médias français et africains, elle fait partie de ces intellectuels africains baptisés les panafricanistes qui ont toujours expliqué le retard du continent noir par les pratiques impérialistes et dévastatrices de l’Occident,la Franceen bandoulière. Ceux-là qui ne voient le développement de l’Afrique que sous un angle unique, la rupture totale des liens que cette dernière entretient avec les pays occidentaux. Les adeptes de la thèse selon laquelle les malheurs, tous les malheurs de l’Afrique n’ont débuté qu’avec sa sanglante et déchirante rencontre avec le monde occidental. Leurs idoles sont connues, et les plus récentes sont Sékou Touré, Mouammar Kadhafi, Laurent Gbagbo, Robert Mugabe… Ces chefs d’Etat-là qui, à travers leurs discours, seulement à travers leurs discours et jamais leurs actes, crient leur amour au continent noir, et leur désir de le voir s’unir pour tenir tête à son éternel ennemi, l’Occident, mais qui ont bizarrement tous été des despotes mégalomanes, voleurs d’élections, massacrant avec mépris et rage leurs peuples chaque fois que ces derniers, bafoués, ont cherché à se libérer de leur joug. Ces chefs d’Etat que Calixthe Beyala a toujours défendus, au nom du panafricanisme, du panafricanisme conçu comme la haine de l’Occident, ce panafricanisme-là qui ne se manifeste qu’à travers les médias, les injures contre l’Occident et ses dirigeants dans la presse, sur Internet, à la radio et à la télévision. Sa passion dans la défense de ses idoles est tellement poussée des fois qu’on se demande quel intérêt elle en tire.
Parce que Calixthe Beyala n’est en rien un modèle de panafricanisme, le vrai panafricanisme. Ce panafricanisme qu’on lui connaît, ce panafricanisme de la presse, de la radio, de la télévision et d’Internet, ce panafricanisme des médias aux grandes audiences, ce panafricanisme des injures et menaces à l’encontre de l’Occident est aussi improductif, aussi nuisible à l’Afrique que les démarches néocolonialistes du Senghor de cette description de V. Remos dans le numéro 19 de Janvier Février 1981 de la revue Peuples noirs Peuples africains « … ce personnage si obstinément dévalorisé pour concrétiser le mythe du bon nègre docile et amical, du bon élève respectueux du Blanc, toujours prêt à dire amen, accumulant diplômes, promotions et faveurs… » Bien sûr que Calixthe Beyala n’est pas, comme le Senghor de la description, docile et amical, du moins elle ne le paraît pas sur les médias. Elle est, elle paraît au contraire une lionne capable de rugir chaque fois pour crier son amour pour l’Afrique et son désir ardent de la voir un jour unie contre l’Occident monstre. Mais à voir de près, entre le Senghor amical et docile de la description qui chaque fois dit amen au Blanc pour ramasser ses miettes etla Calixthe Beyala rebelle et violente, virulente et insoumise qui insulte l’homme blanc et l’Occident sur les médias, il n’y a qu’une différence, la méthode. Le premier accepte de paraître ce qu’il est, la seconde ne l’accepte pas.
Calixthe Beyala, malgré sa peau noire brûlée par le soleil, malgré son nez épaté, malgré ses lèvres lippues… porte, comme un trophée – ou un sobriquet, la dénomination d’écrivaine française. Elle est française et vit, depuis des décennies, en France, loin, très loin de l’Afrique dont elle ne se rapproche qu’à travers les médias où on l’invite pour, au nom de la couleur de sa peau, donner des leçons d’unité aux Africains, leur imposer l’amour de loufoques dictateurs mégalomanes au nom du panafricanisme, et injurier les Africains néocolonialistes élèves dociles et amicaux de la Franceet de l’Occident. Lorsqu’on milite pour une cause, quelle qu’elle soit, on applique ses idées, ne serait-ce que pour donner l’exemple… Il est délicat de blâmer une situation dont on tire profit soi-même, stipule l’écrivain français d’origine congolaise Alain Mabanckou dans son essai, Le Sanglot de l’homme noir, Fayard 2012. Traînailler la nationalité française comme une couronne, vivre en France et profiter d’elle, et sillonner tous les médias pour pérorer unité africaine et panafricanisme, il n’y a que Calixthe Beyala et ses disciples pour nous jouer cette comédie de mauvais goût. L’unité africaine, le panafricanisme se construit, pierre sur pierre, ici, en Afrique, entre les Africains, et non sur des médias aux grandes audiences.
En 2010, elle avait posé sa candidature pour être Secrétaire générale dela Francophonie, cette institution considérée par les adeptes du panafricanisme des médias comme l’outil le plus efficace de propagande de la langue française, la langue de l’impérialisme et du pillage de l’Afrique, cette institution dont tous les collaborateurs noirs sont taxés de nègres vendus àla France, de traîtres et d’Africains ennemis du progrès de leur continent. Elle avait demandé à son pays le Cameroun, euh,la France, son paysla Francedonc, de la soutenir, sans succès. Battue par le Sénégalais Abdou Diouf, elle s’était fondue, mauvaise perdante comme ces dictateurs africains qu’elle soutient, dans de ridicules diatribes contre le vainqueur. Où s’arrête le panafricanisme et où commence la collaboration avec l’Occident impérialiste, quand l’ennemie déclarée dela Franceet de l’impérialisme décide de servirla Francophonieconsidérée comme l’arme la plus redoutable dela Franceimpérialiste pilleuse de l’Afrique ! De « la littérature à l’estomac », comme le dirait l’autre ! De la vraie !
Des va-t-en-guerres ivoiriens ont déjà commencé à commenter l’article sur www.adidjan.net, des commentaires du genre Que ces Camerounais qui viennent de connaître la télé il n y a pas si longtemps que ça s’occupent de la politique de leur pays, ou Mes frères c’est vous qui parlez trop, depuis le premier jour de cette affaire ma position a été claire, cette maudite femme doit rembourser notre argent volé, sinon partout où je trouve Camerounais je finis avec lui, ce qui est sûr pour moi reste pas a l’étranger, Calixthe ta mère con chaque matin jusqu’a ce que tu rembourses notre jeton, maudite-là.
Fasse le Ciel que cette affaire ne soit pas vraie, pour que des Ivoiriens frustrés par la trop grande chute de leur pays ne s’attaquent pas à de pauvres Camerounais innocents en Côte d’Ivoire, leur réclamant leur argent, les violentant, juste parce qu’une panafricaniste, qui n’est camerounaise que par la couleur de sa peau, a une fois de plus, au nom du panafricanisme, profité d’une crise en Afrique pour se mettre en vedette. Comme le dirait Alain Mabanckou, ainsi va le monde. Calixthe Beyala et son panafricanisme bling bling avec.
Titre inspiré du titre, L’Homme qui m’offrait le Ciel, Calixthe Beyala, Albin Michel, 2007.
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