Ce qui coupe le pénis du cheval se trouve dans le ventre du cheval (Septième Partie)

7 avril 2014

Ce qui coupe le pénis du cheval se trouve dans le ventre du cheval (Septième Partie)

Jeune homme africain
Jeune homme africain

Résumé de la sixième partie : Le héros, Karim Diallo, gigolo expérimenté, mais malchanceux de temps à autre, est surpris par un extrémiste musulman alors qu’il achetait des préservatifs dans une pharmacie, un vendredi, en plein mois de ramadan. Haram!

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Karim Diallo n’a jamais été un bon acrobate  – du moins hors du lit d’une couguar,  mais quand, ce midi, il tourna la tête, alerté par les cris du djihadiste blessé, et vit ce dernier entrer en fracas dans la pharmacie son long couteau luisant levé au-dessus de la tête, il ne chercha même pas à savoir celui que l’enragé voulait égorger, et bondit hors de la pharmacie par la seconde porte. La tête haram du cafre peuhl venait de tenir à une seconde, puisqu’au même moment où il venait de s’échapper de sa place, le long couteau du fou de Dieu s’écrasa sur le comptoir en bois, sous le cri horrifié du pharmacien qui demandait en hurlant au tueur ce qu’il voulait. « Ce que je veux, hein, tu me demandes ce que je veux, hein, tuer ce cafre qui ose acheter ce que tu lui vendais ce jour béni, en ce mois béni où tout bon musulman doit se tenir loin des péchés de ce monde. Je vais le poursuivre, je vais aller l’égorger, et quand j’aurai fini de le décapiter, je reviendrai te tuer toi aussi », suffoquait El Hadj Hassan en s’élançant hors de la pharmacie, se dirigeant vers Karim Diallo qui s’était arrêté sous un arbre juste devant la pharmacie, ne sachant pas encore que c’était à lui qu’en voulait l’égorgeur de cafre.

La guenon qui court pour aller gratter les couilles de son amant et celle qui s’échappe devant la massue d’un chasseur n’ont pas les mêmes enjambées, sagesse des anciens.  Quand Karim Diallo comprit que c’était sa tête que voulait ce fou qui hurlait vers lui la machette toujours levée, un homme qu’il ne connaissait ni d’Adama ni d’Hawa, il se lança dans une course effrénée sur la route pavée devant lui, criant « Au secours, sauvez-moi, au secours » pour attirer l’attention des passants se dirigeant tous en hâte vers la mosquée du quartier. Bizarrement, aucun des religieux pressés ne sembla s’intéresser à lui et à son chasseur, personne n’étant disposé à fourrer son nez dans une obscure affaire où un vieux barbu en boubou blanc poursuivait un jeune homme en jeans et T-shirt moulant, en pleine heure de la grande prière.

Karim Diallo courait depuis plus de cinq minutes, hurlant toujours au secours, poursuivi par le djihadiste qui criait toujours dans son dos qu’il allait l’égorger wallahi ! Et toujours personne ne semblait s’intéresser à la scène. Seuls quelques enfants de rue rachitiques, se ressemblant tous par la rondeur de leur ventre, leurs cheveux sales,  et leurs yeux de chauves-souris cherchant désespérément à qui transmettre Ebola, seuls ces badauds pullulant dans tous les coins et recoins de Bamako,  boîtes de tomate en main,  lançaient des éclats de rire poussifs à leur passage. Le gigolo sentait ses forces faiblir et la distance entre lui et le tueur se rétrécir.  Il courait très vite, le presque-imam, malgré son âge, puisqu’il y avait juste quelques mois il détalait dans les dunes chaudes du Nord-Mali, avec ses collègues d’Ansar Dine, de Boko Haram et du Mujao (Mouvement pour l’unicité e le djihad en Afrique de l’Oeust), feintant les bombes, balles, grenades et autres petits bijoux mortels que les cafres de l’opération Serval leur envoyaient depuis leurs hélicos.

Quand Karim Diallo commença à sentir le souffle du disciple de Mokhtar Belmokhtar dans son dos, il se résolut à aller chercher son salut dans cet endroit où même le citoyen le plus étourdi, le plus fou, n’attendrait aucune aide dans ce pays. Le commissariat de police situé juste à une centaine de mètres. Oui, la police, elle-même ! En trois enjambées, il vira dans une ruelle, dévia la tête pour feinter le couteau du tueur de Dieu qui sifflait sous sa nuque, et vit le portail du commissariat qui s’ouvrait à lui, large, comme une nouvelle péripatéticienne devant un bon payeur. Deux jeunes policiers, assis devant le commissariat, se précipitèrent et s’interposèrent entre la proie et son prédateur.  L’ex-djihadiste fut désarmé de son long couteau, alors qu’il jurait toujours que wallahi, même si ce fils de chien partait se réfugier dans l’anus d’une tortue, il irait l’arracher et l’égorger wallahi. On les conduisit chez le commissaire Sory Diarra.

Sur sa carte de visite, Sory Diarra marquait « Commissaire de police » comme profession. Un grand bluff, puisqu’il ne se rendait au commissariat de police, sous sa casquette de commissaire, qu’une ou deux fois par semaine. Sa vraie profession était le rackettage des noctambules étourdis qu’il dépouillait par centaines de leurs billets de banque chaque nuit avec une troupe de policiers non gradés qu’il amenait en patrouille dans le quartier. Dragueur généraliste à ses heures perdues – il avait, chaque jour, au moins 20 heures perdues sur les 24, il s’était spécialisé, il y avait quelques mois, en dépucelage des jeunes collégiennes et lycéennes, depuis qu’une généreuse âme lui avait conseillé qu’à cinquante ans sonnés, il avait besoin de renouveler son sang avec celui des petites filles de seize dix-sept ans pour garder sa fraîcheur et repousser un peu la vieillesse, ennemie implacable et bâtarde.

Quand les deux parties finirent de lui exposer les faits, le commissaire Diarra, consommateur immodéré de préservatifs Manix, ordonna en colère qu’on enferme l’ex-djihadiste pour tentative de meurtre prémédité. Il prit soin de lui expliquer, à l’imam raté, que le Mali restait et resterait toujours un pays laïque, que chacun avait le droit d’acheter ce qu’il voulait et n’importe quand, que s’il voulait un pays islamique, il n’avait qu’à retourner au Nord-Mali y déloger l’ONU et toute sa racaille habillée et y réinstaller ses gourous extrémistes.

A suivre…

Note : Le titre de la nouvelle « Ce qui coupe le pénis du cheval se trouve dans le ventre du cheval » est un proverbe du peuple éwé, peuple vivant au Togo, au Ghana et au Bénin. Le proverbe signifie que la plupart des malheurs d’un homme proviennent de lui-même.

 

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Commentaires

David Kpelly
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It's on!

eli
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Cette histoire me fait pouffer de rire.Cela me rappelle des spots publicitaires à Lomé indiquant que le fait d'acheter un préservatif n'a rien de honteux mais qu'il s'agit d'un choix responsable.Le préservatif reste un tabou pas seulement pour les fanatiques mais aussi pour les autres. En tout cas j'ai apprécié.

DEBELLAHI
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Notre sénégalaise risque de rater l'un des deux: son gigolo de Karim, ou son avion. Récit époustouflant !

Antoinette Koné
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Quel plaisir de vous lire, MONSIEUR KPELLY! Je jure que s'il n'y avait qu'un blog à retenir dans la blosphère africaine, je retiendrai le vôtre, sans même réfléchir. Votre style est trop top wallahi...

Fadense Toure
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Très drôle et très réel. On attend la suite.