David Kpelly

Moi, l’assassin d’Aimé Césaire !


Un homme qui crie n’est pas un ours qui danse

« Salut jeune homme. Je suis un de vos compatriotes, vivant en France, en troisième cycle de droit. Suite à la lecture de plusieurs de vos articles dans des journaux togolais, j’ai décidé d’acheter un de vos livres. Mais permettez-moi de vous dire que c’est avec un grand regret que je referme votre livre, Le Gigolo de la réforme, que j’ai acheté il y a deux jours. Sans détours, je vous dis, jeune homme, que c’est très dommage qu’un jeune écrivain qui a tant de souffle et un style si charmeur puisse prêter sa plume à une cause si vile. Votre démarche d’écrivain ne vise qu’à ridiculiser l’Afrique, déchargeant l’Occident, qui doit sûrement être votre obsession, de toute charge dans les problèmes actuels de notre continent. Vous prenez déjà la voie de ces écrivains africains affamés qui marchandent, généralement en France, leur talent contre des faveurs de leur pays d’accueil, en ridiculisant l’Afrique. Et c’est ce qui est devenu pour vous la mode aujourd’hui, vous écrivains africains surtout de l’Afrique subsaharienne. Et je vous dis que c’est très triste. Une de vos nouvelles m’a particulièrement révolté, celle dans laquelle vous présentez les Africains comme des hommes méchants, sans cœur, à travers la scène d’une jeune pauvre maman qui a été obligée d’aller déposer son fils malade dans une cathédrale, devant une statue de la Vierge Marie, demandant à celle-ci de sauver son enfant que personne ne voulait sauver. N’avez-vous pas honte de traduire une image si fausse de votre continent ? Croyez-vous que l’Afrique, le seul continent où l’on peut encore retrouver des traces de solidarité et d’humanisme, puisse être aussi méchante ? Jeune homme, Aimé Césaire et d’autres écrivains que vous avez sans doute lus ont passé toute leur vie à corriger l’image de la race noire et du continent africain bafouée par les Occidentaux impérialistes, et c’est dommage que vous, pour sûrement des intérêts pécuniaires, vous salissiez ainsi cette race. Vous n’y arriverez pas, vous et tous ces écrivains et intellectuels qui vendez la dignité africaine pour les quelques pièces de monnaie que vous offre l’Occident, surtout la France. Vous êtes encore très jeune, et vous avez la chance de faire partie de ces écrivains qui débutent très jeunes leur carrière et construisent une œuvre consistante. Vous avez un beau style, porté par un humour charmeur, mais vous devez revoir votre démarche intellectuelle. Vous aurez un lectorat qui vous respectera, et même une petite fortune, si c’est de cela que vous rêvez, même en évitant de ridiculiser l’Afrique pour plaire aux Occidentaux. J’achèterai, cette semaine, un autre de vos livres, et je reviendrai une nouvelle fois vers vous pour mes remarques. Bonne chance, jeune homme. »

Que répondre ? Toujours la même formule quand on me critique : « Merci, Monsieur, d’avoir acheté mon livre. Je suis très content que vous m’ayez, du fond de votre cœur, fait des remarques si pertinentes. J’en tiendrai compte parce que les critiques et remarques construisent. N’hésitez pas, une fois que vous aurez lu le second livre, de me faire toutes les remarques et critiques que j’accepterai avec joie. Merci Monsieur, et bonne journée ».

Rien à ajouter. Je suis pris par le temps. Je suis invité, dans quelques minutes, sur une radio privée de Bamako par un étudiant en communication, pour parler, avec des journalistes maliens, de l’intervention de la coalition internationale en Libye. Et là, dans ce groupe d’une dizaine d’invités, je serai peut-être le seul à crier que je suis d’accord avec cette intervention, que je suis d’accord que des puissances étrangères viennent bombarder mon continent, que je suis d’accord que l’on ne sollicite pas l’Union africaine dans le règlement des crises africaines. Que je donne mon feu vert au néocolonialisme, à l’impérialisme, au pillage des ressources de l’Afrique, que je collabore avec le colonisateur, celui-là qui a acheté et vendu, comme une vulgaire marchandise, mes grands-parents… J’irai encore, pour une énième fois, affirmer mon engagement derrière l’Occident contre mon continent. Assassiner Aimé Césaire qui a passé toute sa vie à défendre l’Afrique et la race noire contre les colonisateurs. J’irai encore soutenir que le premier ennemi de l’Afrique d’aujourd’hui ce sont ces intellectuels malhonnêtes – presque tous naturalisés français – qui racontent trop de mensonges, trop de chimères, qui font trop de discours, qui émettent trop de théories verbeuses, qui soutiennent des dictateurs cherchant à s’accrocher par tous les moyens au pouvoir prétendant défendre les intérêts de leurs peuples, que l’Afrique dont avait rêvé Césaire, l’Afrique qu’a aimée Césaire n’est pas celle-là que nous avons aujourd’hui, une Afrique trop irresponsable, trop hypocrite… J’irai dire que je veux que l’Afrique ait, enfin, le courage de se voir en face, de comprendre qu’elle nourrit encore trop de dictatures, trop de paresse, trop de mythes, trop d’orgueil, trop de méchanceté, trop de rêves, trop d’imperfections… J’y crois, et j’irai, encore, défendre ma foi, contre une récompense, les injures et menaces des anti-impérialistes, des antifrançais, des antioccidentaux.


Ma tristesse s’appelle Kadhafi !

Comment ne pas penser à cette chanson de ce conte que Maman Marthe me racontait certains soirs pour me faire dormir ? « Quand tu évites le malheur, il vient te chercher. Le malheur m’a cherché, le malheur m’a trouvé, je suis foutu, oh ! » Moi qui me croyais si loin de la Libye, si loin de cette tuerie ! 

Je n’ai pas mis le nez dehors depuis le matin, moi qui aime profiter pleinement des deux derniers jours de la semaine pour aller faire mes interminables courses et surtout papoter comme une femme chez des compatriotes, profitant pour manger chez eux des plats du pays que je ne peux m’offrir chez moi, faire la cuisine étant mon deuxième ennemi après la mort.

Mes deux yeux plus myopes que ceux d’une taupe sont rivés sur les pages d’un bouquin du Brésilien Paulo Coelho qui raconte très bien une histoire d’amour qui ne me plaît pas. Ah, que je déteste les histoires d’amour, surtout quand je les lis un samedi matin, au lieu d’aller au prêt-à-porter chercher une chemise pour le soir… pour aller décrocher un nouvel amour… pour une énième histoire d’amour ! Euh, bon, j’arrête, j’arrête avec ce chapelet de contradictions ! Ah, que j’aime les histoires d’amour !

Ben, alors, euh, ouais… Je suis chez moi enfermé, incapable de sortir. Je veux pas mourir célibataire. Qui me pleurera, hein ? Il n’y a de meilleur pleureur pour un cadavre que son conjoint.

Bamako, la capitale malienne, a abrité le vendredi 25 mars 2011 une grande marche de soutien à Mouammar Kadhafi, marche organisée par une certaine Coalition malienne de soutien à la Grande Jamahiriya Arabe Libyenne. « Que Dieu aide Kadhafi et son armée à vaincre les ennemis », « A Bas Sarkozy, A Bas Obama, A Bas Cameron » avaient glosé les manifestants durant leur marche.

Le but de la marche n’était pas seulement de soutenir Kadhafi mais de s’attaquer aux ressortissants de tous les pays impliqués dans la guerre contre Kadhafi vivant au Mali, les Français, Anglais et Américains surtout. Un Magrébin qui avait eu le malheur de croiser ces chiens enragés avait failli laisser sa vie à ces malabars qui s’étaient jetés sur lui, lui qui parlait mieux bambara que l’emblématique roi de Ségou Da Monzon, lui assénant de violents coups, le prenant pour un Occidental. Il fut sauvé par le parking d’un bureau d’études de Bamako… Beaucoup de manifestants, plus analphabètes que des gris-gris, auraient même entendu dans le nom du Premier ministre britannique, David Cameron, le mot « Cameroun » et se seraient apprêtés, après la marche, à aller s’attaquer aux étudiants camerounais pullulant à la fac de médecine de Bamako, croyant que le Cameroun, le pauvre, qui n’arrive pas à se débarrasser de son saurien de type préhistorique, faisait aussi partie de la coalition internationale en Libye. On dut leur expliquer, après maintes difficultés, que « Cameron » n’avait rien à voir avec le pays du vieux père Biya. Ruth m’a même rapporté hier nuit, en riant, que des Maliennes, s’étant dépigmentées pour fuir ce crasseux teint noir de merde qui les fait chier, s’étaient fait agresser et violer – vive la libido pro-kadhafi – par des jeunes de leur quartier qui les avaient prises dans la pénombre pour des Blanches. Qu’elle peut être moche, ma Ruth, quand elle ment ! Étant elle-même très claire de teint, elle dut, pour fuir les agresseurs, passer la nuit chez moi, pour la première fois. Gloire à Kadhafi au plus haut des cieux, et paix sur la terre à ses adeptes qui agressent, violent et tuent !

Et pour nous, étrangers, qui ne parlons que français, adeptes et valets de la France donc, vient de commencer un long chemin de croix. On doit se cacher ! Je m’imagine au marché, devant un de ces pro-kadhafi et antifrançais :

Le pro-kadhafi (en bambara) : ani sogoma (comment allez-vous ?)

Moi : Euh, je parle pas bambara moi (avec mon accent français roulé)

Le pro-kadhafi (faisant appel à d’autres pro-kadhafi) : Euh, venez, venez, les voilà, voilà un de ces serviteurs de la France, c’est eux qui bombardent Kadhafi et son armée, qui sait même s’il n’est pas ici au Mali sur un plan de la France, hein ! Venez, on l’assassine sur-le-champ, ce valet de la France, de l’impérialisme, du néocolonialisme…

Je suis ennuyé de m’enfermer chez moi ainsi un samedi. Ruth devait passer depuis le matin, mais elle n’est pas là. Son téléphone ne sonne pas. Des pro-kadhafi l’auraient-ils confondue à une Blanche ? Je m’inquiète pour elle. Je suis triste. Mes deux yeux myopes sont toujours rivés sur les mots de Paulo Coelho, Le Zahir, que son livre s’intitule, un mot qui en arabe signifie « visible ». Oui, Kadhafi, on dit que tu luttes pour les intérêts de la Libye que tu défends contre les Occidentaux voleurs, mais ce qui est aujourd’hui visible, que nous voyons tous, c’est que tu as plongé ton peuple, et des milliers et des milliers d’individus, tu nous as tous plongés, par ta soif démesurée du pouvoir, dans une ténébreuse angoisse.

 


Ma mère, rivale de mon amour

–          David, tu aimes trop ta mère !

–          Ben, c’est normal, Ruth, combien de fois dois-je te dire que cette femme s’est trop sacrifiée pour moi ?

–          Je sais, mais tu l’aimes trop, tu l’aimes comme si tu étais encore un adolescent. Tu es maintenant un homme, David, et tu l’aimes trop, ma belle-mère, ta Maman Marthe.

–          …

Que répondre ? J’ai déjà à plusieurs reprises expliqué à Ruth que je ne peux qu’aimer ma mère comme je le fais. Cette jeune fille tombée amoureuse puis enceinte de son prof d’anglais au lycée, mon père, rejetée par ses parents avec sa grossesse, devenue une institutrice reconvertie en ménagère par mon père qui ne pouvait pas supporter une femme fonctionnaire comme lui, veuve à quarante ans à la mort de mon père, avec quatre enfants sous les bras, mes trois sœurs et moi… je ne peux que l’aimer comme je l’aime aujourd’hui. Je la revois toujours, quelques jours après la mort de mon père, quand nos oncles et tantes s’étaient emparés, arbitrairement, des biens de ce dernier, à genoux, tous les matins, récitant des prières et des prières pour notre survie. Je la revois, assurant à ses copines qui la plaignaient, qu’elle s’en sortirait avec nous, que nous n’allions pas abandonner les études, encore moins devenir des délinquants, comme l’avaient prédit beaucoup de mauvaises langues. Je la revois, à l’obtention de mon baccalauréat, m’assurant qu’elle allait m’inscrire dans une école supérieure privée, ces écoles réservées à une catégorie très privilégiée de Togolais, elle qui se tuait déjà à assurer les études supérieures de ma grande sœur au Bénin. Je la revois se débarrasser une à une de ses paires de pagne, de ses bijoux… pour payer ma scolarité. Ses larmes et ses larmes, quand je pliais mes bagages pour le Mali, pour un stage… Ses bips de tous les soirs depuis mon départ du Togo il y a presque trois ans, exigeant mon appel, pour écouter ma voix, savoir si j’ai bien passé la journée, si j’ai mangé, si j’ai prié… afin de pouvoir dormir en paix…

– Ruth, tu vois pourquoi je n’ai pas le choix, je ne peux qu’aimer ma mère, fort, très fort, comme je le fais. Cette femme mourra le jour où je cesserai de lui donner la dose d’amour que je lui donne. Je dois aimer Maman Marthe, Ruth. D’ailleurs il faut que je cherche une carte pour l’appeler, il est midi, elle doit être en train de manger. Je vais lui raconter une petite blague, cela lui fera faire une bonne sieste.

– Depuis hier tu as oublié d’appeler mon père, pourtant il te demande. Voici plus d’une semaine qu’il te demande, depuis qu’il est hospitalisé, et tu n’es pas parti le voir, tu ne l’appelles pas après ta mère ?

– Oui, je l’appelle avant le soir.

– Pourquoi pas maintenant ?

– Il faut que je raconte d’abord une blague à Maman Marthe, elle aime quand je lui raconte des blagues. Tu sais, quand j’étais plus jeune, quelques années après la mort de mon père, chaque soir, avant d’aller au lit, elle me disait…

– Tu achètes une carte de cinq mille pour appeler papa après avoir appelé ta mère…

– Euh, je dois même lui envoyer ses pagnes demain, elle doit vite les avoir, son anniversaire c’est la semaine prochaine et…

– Tu as envoyé des basins à ta mère il y a à peine un mois et…

– Mais je lui envoie des pagnes cette fois-ci, Maman Marthe ne portera jamais du basin pour son anniversaire, elle adore les pagnes.

– Tu m’offriras quoi, à moi ta fiancée, le jour du deuxième anniversaire de notre rencontre ?

– Euh, je verrai, Ruth, t’inquiète, ce sera une très belle robe. Attends que je cherche la carte pour appeler Maman Marthe avant qu’elle ne commence sa sieste…

– Puis mon père.

– Euh, euh, oui…

– C’est quand le deuxième anniversaire de notre rencontre, David ?

– Euh, il faut que je fouille mon agenda, Ruth, tu sais que je ne garde pas les dates d’anniversaire en tête et…

– A part celle de ta mère, ma belle-mère, hein. David c’est aujourd’hui le deuxième anniversaire de notre rencontre. Voici maintenant deux ans que nous nous aimons. Que tu as décidé de donner la plus grande partie de ton amour à une seule femme, moi. J’ai laissé ton cadeau ce matin dans ton armoire. Tu m’offres quoi, toi ?

– Euh, je verrai, je te chercherai un pagne demain, en allant chercher ceux de Maman Marthe.

– Ah, oui, un cadeau pour moi, ta fiancée, quand tu iras chercher celui de ta mère. David, tu aimes trop ta mère, comme un adolescent. Tu es un homme, et tu aimes trop ta mère.


Les onze travaux du roi Kadhafi

Mouammar Kadhafi, le Guide de la révolution libyenne, le roi des rois d’Afrique… mène un grand combat. Le dernier de sa vie. Ou le énième, pour sa survie. Car il aura survécu, Kadhafi, s’il arrive à s’en sortir, de quelque manière que ce soit, de ce combat qui l’oppose à son peuple… et désormais au monde.

Mouammar Kadhafi s’est, aveuglé par son ineffable ego de vieux dictateur orgueilleux, entraîné dans un dédale d’où il ne sortira pas sans égratignures. Pour ne pas avoir surpassé sa superbe du haut de son piédestal pour écouter, et satisfaire, dans la moindre mesure possible, les revendications de son peuple en quête de l’indispensable liberté, celui qui a su, par force intimidations, menaces et incantations, se faire entourer d’une révérence exagérée, a fini par déclencher le courroux d’un peuple frustré par trop de génuflexions et humiliations. Et quand un tyran gonflé, orgueilleux, un mégalomane sans lois se fait humilier, aux yeux de toute la terre par des hommes qu’il a passé des décennies à montrer comme ses valets à jamais soumis, il réagit, toujours, de la manière la plus horrible. Pour montrer à toute la terre qu’il est loin d’être Ben Ali ou Moubarak, qu’il est un guide intouchable et non un chef d’Etat, Mouammar Kadhafi, au nom de la défense des intérêts de son peuple – sacrilège !-, a fait resurgir ses instincts de tueur sans limites. Une dizaine de milliers de morts en un mois d’affrontements ! Du champagne pour le roi des rois d’Afrique !

Mouammar Kadhafi doit quitter le pouvoir en Libye, après quarante-deux ans de dictature ! C’est le peuple libyen, seul propriétaire de la Libye, qui l’a décidé. Et il faut l’aider, ce peuple sans force et sans armes qui n’aspire qu’à sa dignité, juste sa dignité.

On comprend aujourd’hui très mal la position de ces Africains, perchés sur le piédestal en argile de leur panafricanisme, qui n’apprécient pas, condamnent les raids de la coalition internationale en Libye depuis le 19 Mars 2010. C’est normal que notre amour-propre soit touché par cette humiliation qui consiste à prendre des décisions concernant l’Afrique sans l’accord des Africains. C’est révoltant de remarquer que Nicolas Sarkozy cherche à travers cette intervention en Libye à redorer le blason à sa diplomatie bafouée… Mais qui pouvons-nous accuser, si ce n’est notre propre incapacité à régler nos problèmes ?

Le peuple libyen est aujourd’hui en danger, il est persécuté par un terroriste qui n’a pas de conscience, et qui vient de perdre la raison. Et il faut le sauver, ce peuple martyrisé depuis maintenant plus d’un mois. Par la force ! Car Kadhafi, comme tout potentat, ne comprend qu’un langage, celui de la force, la violence. Il faut sauver le peuple libyen ! Pas au nom d’un accord ou d’un règlement voté par une institution, mais au nom de la morale. Les scènes de liesse populaire dans les rues de Benghazi et des autres villes libyennes hostiles au tueur quarantenaire suite aux premières frappes de la coalition prouvent que ce peuple violé a besoin d’aide, une aide qui ne peut venir que de l’extérieur. La coalition internationale doit aujourd’hui, comme elle le fait, sauver la Libye au nom de la morale. Elle doit la sauver comme elle doit sauver la Côte d’Ivoire des atrocités de Laurent Gbagbo, le Burkina Faso de la dictature hypocrite de Blaise Compaoré, le Togo des lâches matoiseries de Faure Gnassingbé et de la dictature cinquantenaire, le Yémen, le Bahreïn et tous les autres peuples qui disent non à la dictature…

Tous ces intellectuels africains-là qui dénoncent aujourd’hui l’intervention de la coalition internationale en Libye ont déjà crié au secours à la communauté internationale lors des crises dans leurs pays respectifs. Ces Sénégalais, ces Congolais, ces Togolais, ces Ivoiriens, ces Maliens, ces Guinéens… qui jouent aujourd’hui aux anti-impérialistes, préférant voir Kadhafi tuer par dizaines les Libyens que de voir l’Occident défendre ce peuple sans soutien ont déjà demandé l’assistance de la France, des Etats-Unis et des autres puissances occidentales dans la gestion des crises qui ont secoué leurs pays. C’est ainsi, l’anti-impérialisme des Africains. Un anti-impérialisme brodé d’hypocrisie et de méchanceté. Quand la violence touche nos pays, quand sous nos yeux tombent sous les balles assassines nos frères et sœurs, quand directement nous nous sentons menacés, nous crions au secours à la communauté internationale, et quand le spectre de la violence et de la mort est brandi ailleurs, ne fût-ce qu’à quelques kilomètres, nous jouons aux antioccidentaux glosant, incapables, qu’il faut laisser l’Afrique régler ses problèmes.

Interviewée ce 23 mars 2010 sur la Radio France internationale, Adame Ba Konaré, épouse de l’ancien chef d’Etat malien et ex-secrétaire général de l’Union africaine, Alpha Oumar Konaré, condamnait cette intervention de la coalition internationale répétant la sempiternelle dissonante chanson de nos pseudo anti-impérialistes, les Occidentaux ne visent que le pétrole et le gaz libyens, on devait laisser l’Union africaine trouver une solution pacifique. Et c’est là le drame, notre drame ! Encore, toujours cet orgueil teinté de cynisme ! Elle a oublié, l’historienne malienne, que cette Union africaine-là, que ce soit sous son mari Alpha Oumar Konaré ou sous tous ses autres secrétaires généraux, a déjà, à plusieurs reprises, montré qu’elle n’a pas les moyens de sa politique verbeuse. Alpha Oumar Konaré était à la tête de la commission de l’Union africaine en 2005, quand les hideux, pestiférés et détestables militaires togolais, à la mort du sinistre Eyadema, avaient intronisé Faure Gnassingbé dans le sang de milliers de Togolais hostiles, comme la quasi-totalité du peuple togolais, à la dictature militaire, sanguinaire et archaïque du Rassemblement du Peuple togolais. Cette Union africaine n’avait pas réussi à dicter sa loi à ce groupuscule de félons martyrisant ce petit Togo. La seule solution qu’elle avait pu trouver, c’était d’accepter Faure Gnassingbé rejeté, craché comme une salive fétide par le peuple qu’il prétend diriger. L’Union africaine a vu naître, croître et mûrir un chapelet de crises en Afrique sans avoir réussi à y trouver même un semblant de solution. Elle ne peut rien régler en Afrique, cette inutile, nuisible institution internationale ! C’est d’ailleurs cette incapacité notoire qui lui colle à la peau qui la pousse à prendre des résolutions bancales comme proposer le partage du pouvoir entre un président élu qu’elle dit reconnaître et son adversaire qu’elle prétend ne pas reconnaître. Le monde entier, en commençant par les Africains eux-mêmes, sait qu’aucun pays africain n’est capable aujourd’hui de régler ses propres problèmes, encore moins ceux des autres pays africains. Voici plus de trois mois que l’UA est en train de tourner sur elle-même, désœuvrée, incapable de trouver la moindre solution à la crise ivoirienne, regardant, indécise, à court d’idées, le pire s’approcher à grands pas de la Côte d’Ivoire, un pays incontournable en Afrique noire. Kadhafi prendra le plaisir d’exterminer toute la population libyenne, et l’UA, composée rien que de chefs d’Etat mendiants, ayant bénéficié de toutes les largesses avilissantes de ce louche dictateur, et qui redoutent aujourd’hui ce dernier au point de ne pas être en mesure de lui donner le moindre conseil, restera inerte, comme toujours.

Mouammar Kadhafi a réussi à accomplir onze travaux, terroriser tout un peuple pendant plus de quarante ans, s’imposer, par force menaces, filouteries et mensonges, comme un grand bienfaiteur soucieux du bien-être de son peuple et de ses voisins, mais le douzième, qui fait entrer dans l’Histoire, il ne le réussira jamais. De ce combat qui l’oppose à son peuple et au monde, il ne sortira plus comme le grand guide combatif qui sait tenir tête à l’Occident pour défendre les intérêts de son peuple, mais comme un tyran sans cœur qui a dévasté son propre peuple pour s’accrocher au pouvoir. Et c’est ainsi que le connaîtra l’Histoire.


En attendant le dernier soupir du dernier Libyen !

 

Le panafricaniste sanguinaire

Il est parfois dur de balancer certaines vérités, mais cela arrive des fois de soi. Il faut les sortir pour être soulagé. Certains jeunes Africains inspirés par des pseudos intellectuels médiocres, nuls, nuisibles, tiennent des fois des propos tellement bébêtes que l’on se dit qu’avec une jeunesse comme celle-là, eh bien, notre chère Afrique des fiers guerriers – allez les voir, ces fiers guerriers- dans nos savanes ancestrales,  risque d’être, éternellement, ce qu’elle a toujours été, comme nous la connaissons, une véritable merde à faire vomir de dégoût.

J’avais hier, samedi 05 mars, comme presque tous les premiers samedis du mois, donné une conférence à des étudiants en Marketing et Communication des instituts supérieurs privés maliens où je donne des cours. Et, comme d’habitude, après les deux heures de conférence, nous avions eu une heure de débat sur l’actualité africaine. Un véritable regret !

« Monsieur, vous devez comprendre ceci, je n’affirme pas que Kadhafi a raison de tuer les Libyens, mais le problème est que ce monsieur est en train de défendre les intérêts de la Libye contre les pilleurs de l’Occident. Les Libyens, Kadhafi les a complètement mis à l’aise. Pourquoi se révolteront-ils ? Ce sont les Occidentaux qui les manipulent, pour faire quitter Kadhafi et avoir la mainmise sur le pétrole libyen. Kadhafi est un panafricaniste et il a toujours prôné la création des Etats-Unis d’Afrique qui ne se réalise toujours pas parce que les autres chefs d’Etat ne sont pas avec lui. Il faut des présidents comme lui et Gbagbo pour faire émerger l’Afrique et la libérer du joug des Occidentaux. La françafrique, on en a marre ! ». La cinquantaine de ses camarades avaient applaudi, satisfaits, noyant le profond soupir de désespoir que j’avais poussé. De quoi le porter en triomphe sur des milliers de kilomètres, lauriers autour de la tête, par certains intellos noirs de la France, la Franco-Camerounaise Calixthe Beyala en tête. L’Afrique et ses panafricanistes !

Et le problème de l’Afrique est là. Juste là. Toujours là à se gaver de chimères, d’utopies, de mensonges, ce continent ! Il suffit aujourd’hui que l’Occident, la France, la pauvre, surtout, s’ingère dans les affaires d’un pays africain pour protéger un peuple qui se fait massacrer par un tyran que ce dernier trouve un argument pour justifier sa tuerie, ses opposants sont manipulés par la France et l’Occident avides des richesses de ce pays. Et la stratégie marche très facilement. Le seul moyen aujourd’hui pour un dictateur assassin africain de se faire aimer, glorifier par les leaders d’opinion africains est de provoquer le courroux de l’Occident, la France surtout. Il peut donc massacrer à satiété son peuple, invoquant la légitime défense de son Etat souverain – ah, ce terme de la souveraineté -, avec la bénédiction de nos médiocres intellectuels, hélas, très écoutés.

Kadhafi panafricaniste prônant, désirant la création des Etats-Unis d’Afrique, défendant la Libye et toute l’Afrique contre les Occidentaux ! Horreur !

Kadhafi a bel et bien été, il a été, bien sûr, un symbole, un grand symbole pour toute l’Afrique, pour avoir pendant des décennies tenu tête aux Occidentaux, parfois au prix de sa vie. Et l’Afrique en a besoin, ces symboles. Laurent Gbagbo l’a aussi été, à sa manière, pour toute l’Afrique noire. Il faut des hommes de ce genre, pour montrer surtout à la jeune génération africaine que leur continent n’est pas destiné à toujours se soumettre à l’Occident. Mais une fois que ces symboles, pour s’accrocher au pouvoir, juste s’accrocher au pouvoir, commencent par assassiner leurs peuples, eh bien, ils deviennent des calamités, de véritables catastrophes dont l’Afrique doit se débarrasser. Si Laurent Gbagbo, invoquant la défense de la souveraineté de la Côte d’Ivoire, peut aujourd’hui massacrer des Ivoiriens, des Ivoiriennes, qui ont voté et qui réclament que leur volonté soit respectée, s’il peut voir son peuple ahaner aujourd’hui sous toutes ces sanctions internationales qu’il ne sent pas lui, s’il peut voir sans frémir que les rebelles sont prêts une fois de plus à semer la mort en Côte d’Ivoire, il est tout simplement un vulgaire assassin à poursuivre par la Cour Pénale Internationale. La souveraineté de la Côte d’Ivoire, c’est au peuple souverain de la Côte d’Ivoire de la défendre, et non à un dirigeant pas même élu.

Kadhafi, ah Kadhafi ! Ce débat indigeste que j’ai eu avec ces adeptes de ce panafricanisme du sang m’a fait voir des vidéos sur différents sites d’informations sur les tueries dans les différentes villes de la Libye. Des horreurs ! Le journal www.leparisien.fr  détaille, sous le titre Libye : les insurgés progressent vers l’Est, massacre à Zaouïa avec des vidéos – très choquantes – les massacres organisés par les mercenaires de notre grand panafricaniste, roi des rois d’Afrique, contre les opposants. Des dizaines de morts et des centaines de blessés !

Kadhafi est un terroriste ! Un paria infréquentable ! Un Président qui peut tuer un seul de ses administrés, pour quelque raison que ce soit est un assassin ! Comment un monsieur qui n’est même pas capable de maîtriser, sans violence, son peuple révolté contre sa dictature cinquantenaire peut-il aider l’Afrique à s’unir ? Kadhafi qui tue aujourd’hui par milliers des Libyens frémira-t-il un jour, quand il sera bien évidemment le président des Etats-Unis d’Afrique, avant de faire tuer des Algériens, des Congolais, des Maliens, des Tunisiens, des Togolais… qui se révolteront contre lui ? Ah, chers adeptes du panafricanisme, vous qui défendez l’Afrique contre l’Occident, vous n’y aviez donc pas pensé. Vous ne savez pas que vos guides qui vous aideront à former vos Etats-Unis d’Afrique, pour vous libérer de l’Occident, ne sont que des tyrans bourrés de mégalomanie qui peuvent accepter tout perdre sauf le pouvoir !

Rien ne semble arrêter le libérateur de l’Afrique, le défenseur de la souveraineté de l’Afrique contre l’Occident. Kadhafi massacre son propre peuple, un peuple qu’il dit aimer – et qui l’aime, dit-il – avec tous les moyens à sa disposition. Ah, il ne les massacre pas, il les défend, il défend leur pays, il défend l’Afrique contre les Occidentaux, les voleurs ! Et il le défendra, ce peuple qu’il aime comme il l’affirme, jusqu’à la dernière balle, jusqu’au dernier soupir du dernier Libyen. Et, perché sur la montagne de cadavres des millions de Libyens qu’il aura tués, sous les yeux jaloux de l’Occident vaincu, il proclamera aux cadavres « Peuple libyen, te voilà, enfin, libéré de l’Occident, tu es maintenant souverain, et tu peux maintenant jouir en toute liberté de toutes tes richesses, pourvu que je sois toujours ton guide, pas ton président, mais ton guide. »


Militaires… togolais, on vous hait !

 

Messieurs, on vous hait!

« Moi je suis militaire, oui militaire togolais…officier des FAT… » Cette phrase inachevée, la quasi-totalité des Togolais l’aurait ainsi complétée « … Et je peux te créer de graves ennuis, te détruire complètement dans ce pays… » Mais dans le mail qui m’a été envoyé ce mercredi 02 mars 2011 par un officier des Forces armées togolaises qui venait de découvrir mon blog Castigat ridendo mores, elle se complète ainsi « … dure la vie d’officier togolais ».

Dans mon article Je déteste les militaires, mon fils !, que mon lecteur militaire, dont je préfère taire le nom, a particulièrement apprécié, je faisais ressortir, à travers une courte discussion entre une femme togolaise et son fils désirant épouser une fille en formation dans une école militaire, l’ineffable haine que couvent aujourd’hui les Togolais contre leur armée, non l’armée togolaise,  et par là tous les corps habillés notamment la police et la gendarmerie. Dans son long message chargé d’émotion, porté par un ton très fraternel qui m’a ému, ce lieutenant, qui doit vraiment avoir subi plusieurs mésaventures dans sa vie sentimentale juste à cause de son statut de militaire… togolais, semble sincèrement regretter le comportement indigne de ses frères d’armes qui ont fini par donner aux Togolais une très mauvaise image du militaire.

Qu’est un militaire au Togo ? Une brute analphabète sans cœur, un malabar non civilisé et violent s’étant jeté dans l’armée parce que fatigué de passer sans succès son examen de Certificat d’Etudes du Premier Degré, CEPD, et qui est payé par le Rassemblement du Peuple togolais, le RPT, le parti au pouvoir, pour terroriser et tuer les opposants au régime en place.  Nous les avons connus ainsi, comme c’est ainsi qu’ils ont toujours voulu que nous les connaissions.

C’est très émouvant pour nous autres de voir, avec la révolution du monde arabe, le rôle salvateur que peut jouer l’armée dans un pays. Une institution qui a toujours le dernier mot, prête à s’aligner sur les revendications légitimes du peuple souverain, pour stopper un tyran dans sa folie. C’est très touchant de voir à Benghazi, en Libye, des militaires  veillant, prêts à défendre, contre leur vie, la vie des opposants au régime de Mouammar Kadhafi. « Si les forces de Kadhafi attaquent par la terre nous répondrons, s’ils attaquent par les airs nous répondrons… » affirme un officier de Benghazi. Les militaires libyens sont aujourd’hui debout pour protéger leurs frères sans armes contre les terroristes de Kadhafi. Qu’en disent les militaires togolais ?

L’armée togolaise doit se reprocher aujourd’hui beaucoup de choses dans la sempiternelle crise sociopolitique de notre pays. Non seulement elle a aidé Eyadema à asseoir sa dictature pendant presque quatre décennies, mais aussi elle a, à la mort de ce dernier, quand le peuple togolais poussait un ouf de soulagement, se croyant à la fin de son long chemin de Croix, imposé Faure Gnassingbé dans une boucherie jamais vécue dans notre pays. Presque chaque Togolais a perdu, en 2005, ou un parent, ou un ami, ou un conjoint, ou une connaissance proche ou lointaine dans cette tuerie organisée par les militaires togolais sur les ordres des barons du Rassemblement du Peuple togolais. Et comme si la condition actuelle des Togolais ne leur faisait pas pitié, ces sinistres militaires continuent de défendre le régime illégitime de Faure Gnassingbé en terrorisant les civils à la recherche de leur dignité. Les militaires libyens sont aujourd’hui debout pour protéger leurs frères sans armes contre les terroristes de Kadhafi. Qu’en dites-vous,  frères d’armes togolais ?

Il y a au Togo cette conception qui stipule que l’armée togolaise est tribale, et que la majorité des militaires togolais serait du Nord. Je n’y crois pas. Tout comme je n’ai jamais cru en cette dichotomie qui fait du sud du Togo la propriété de l’opposition et le Nord le fief du régime dictatorial du Rpt. D’ailleurs, cette conception ne peut en rien expliquer le comportement incompréhensible de nos militaires qui sont toujours prêts à tuer les civils pour protéger la dictature cinquantenaire togolaise. Nous sommes à peine six millions au Togo, et notre population, malgré ce louche conflit Nord/Sud récupéré par les politiciens – les opposants surtout -, s’est tellement entremêlée que se déclarer aujourd’hui du Nord ou du Sud serait purement se leurrer. Nous avons tous, Togolais du Sud, un frère, ou une sœur, ou un cousin, ou une cousine… qui est marié à un Togolais du Nord. Et chaque Togolais du Nord a d’une manière ou d’une autre une alliance avec chaque Togolais du Sud. Notre division n’est pas arrivée – et n’arrivera d’ailleurs jamais – à cette étape où être un Togolais du Sud ou du Nord pourrait être une barrière pour une union dans notre pays. A moins que ce ne soit dans une de ces familles fanatiques et bornées du Sud qui se croient tellement supérieures aux autres Togolais qu’ils seraient aujourd’hui prêts à exterminer tous les Togolais qui ne portent pas leurs noms qui les rendent si suffisants, malgré leurs multiples insuffisances. Et chaque militaire togolais du Nord, si tous les militaires togolais étaient réellement du Nord, qui tire sur un civil du Sud doit savoir qu’il tue le mari ou la femme, ou le fils ou la fille, ou le cousin ou la cousine d’un de ses frères du Nord. Beaucoup de journaux togolais ont relaté durant le mois de Janvier 2011 des violences gratuites commises par des militaires togolais du camp de Témédja sur des populations de ce village togolais. L’irresponsabilité, l’inculture et l’incivisme sont les seuls mots qui peuvent vraiment expliquer l’attitude des militaires togolais.

L’opposition togolaise n’inspire pas confiance dans l’état où elle est aujourd’hui. Elle n’a d’ailleurs jamais trop inspiré confiance, et ce serait de la pure plaisanterie que de demander aux militaires de destituer Faure Gnassingbé pour donner le pouvoir à ces écrivaillons de romans à l’eau de rose que nous avons à la tête de notre opposition. Mais il faudra que les militaires togolais tirent aujourd’hui des enseignements de l’attitude de leurs frères du monde arabe, pour les prochaines échéances électorales. Ils ne sont pas là pour terroriser les Togolais, tuer les militants de l’opposition, bourrer et voler des urnes pendant les élections, empêcher des marches de protestation, protéger une dictature… défendre un président mal élu, non élu, mais l’Etat togolais. Et défendre le Togo, c’est le libérer de la main de ses usurpateurs que constituent aujourd’hui Faure Gnassingbé, sa sinistre bande du Rpt et quelques leaders de l’opposition bourrés de démagogie, et le donner au peuple, son vrai propriétaire.

Faure Gnassingbé et le Rpt vont chuter. Demain. Après-demain. Un jour. Et le peuple togolais qui est là aujourd’hui, comme un mendiant assis dans un coin de rue tendant la sébile, retrouvera son trésor volé, le Togo. Un peuple qui dit non finit toujours par gagner. Et vous, frères-cauchemars, vous occuperez, dans l’Histoire, avec cette calamité de régime que vous défendez aujourd’hui, la place qu’occupent les vilains sorciers dans les contes et légendes. Celle des bourreaux perdants. Ca, j’y crois. Toujours.


La révolution presque cocasse des Togolais1

La révolution presque cocasse des Togolais1

Le premier qui va rigoler de notre révolution, c’est lui!

Prologue

Un lecteur du site Icilome.com (www.icilome.com), l’un des plus grands journaux en ligne du Togo où je signe des contributions, m’a écrit un mail ce samedi, me demandant pourquoi depuis le début des soulèvements au Maghreb, je n’ai pas encore publié un seul article pour faire un rapprochement avec notre pays le Togo, et exhorter l’opposition togolaise et tout le peuple à se soulever contre le régime illégitime, dictatorial, lâche et éhonté de Faure Gnassingbé. Depuis que je suis retourné en novembre dernier au Togo pour recevoir le Prix Littéraire France-Togo 2010, poursuit mon cher lecteur, on ne me sent plus à travers mes articles virulents. M’aurait-on corrompu à Lomé ? Ah, le cynisme de certains Togolais !

Un rapprochement entre les révolutions du monde arabe et le Togo ! Bah, quelle audace ! Quelle gaucherie ! Le Togo ne partage actuellement la situation sociopolitique d’aucun de ces pays qui se soulèvent contre leurs tyrans ces temps-ci. Un adroit blogueur togolais le faisait remarquer dans son article, la révolution du peuple togolais a déjà eu lieu, il y a plus de vingt ans –en 1990- quand le peuple s’est soulevé victorieusement contre le sinistre Eyadema, et le Togo jouit depuis de plusieurs avantages dont n’ont jamais joui ces pays du monde arabe. Très belle remarque, dans la mesure où le pouvoir dictatorial du Togo a des fois – par imprudence ou contrainte – fait à l’opposition togolaise certaines concessions qui eussent pu lui être fatales si les opposants togolais avaient tout simplement été plus lucides et moins cupides et vils. L’opposition togolaise avait réussi à avoir une tribune où s’exprimer et se faire écouter, la conférence nationale souveraine. Elle avait eu la sublime chance d’avoir remporté des élections législatives, notamment avec le Comité d’Action pour le Renouveau, CAR, de l’opposant Yawovi Agboyibo. Elle avait réussi à avoir des dialogues avec le parti au pouvoir, des gouvernements d’union nationale, des accords dont le célèbre Accord politique global, APG, de 2006… Tant et tant d’occasions mal négociées… Pourquoi donc aurait-on encore besoin d’un soulèvement populaire au Togo pour destituer le parti au pouvoir, un parti si fragile, si incohérent, si mal organisé, malgré l’apparente coquille de solidité dont il se pare juste pour impressionner ?

Soulèvement populaire au Togo ? Eh bien, parlons-en, puisque tout le monde s’efforce aujourd’hui de l’imaginer.
Le Togo est sans doute le pays africain où un soulèvement populaire réussirait très facilement à faire tomber le régime en place, en une fraction de seconde. Pour plusieurs raisons.

D’abord, connaissant très bien les aspirations du peuple togolais, je ne vois pas aujourd’hui une seule région du Togo qui serait favorable au régime de Faure Gnassingbé, qui est sans aucun doute l’un des régimes les plus impopulaires de l’Afrique. Du Sud, fief incontestable et légendaire de l’opposition au Nord – l’origine des Gnassingbé -, Faure Gnassingbé n’a pas aujourd’hui une seule ville capable de défendre jusqu’au bout son régime. En 2005, lors de la boucherie qui a suivi la mort d’Eyadema, plusieurs villes du Nord ont connu plus de victimes que celles du Sud pendant les contestations postélectorales. La quasi-totalité des Togolais est prête aujourd’hui à extirper Faure Gnassingbé hors du Togo, si l’occasion se présente.

Ensuite, la légèreté de Faure Gnassingbé devant la communauté internationale, reconnue pour son hypocrisie, qui n’hésiterait pas à s’aligner sur le peuple togolais une fois qu’il se jette dans la rue, comme elle l’a jusqu’ici fait pour tous les peuples arabes qui se révoltent. Et Faure Gnassingbé, petite bite inconnue, minuscule, lâche et timide, n’hésiterait pas à s’enfuir sous une ou deux menaces de l’ONU et de l’UE, pour aller trouver refuge loin, très loin du Togo, chez Berlusconi, par exemple, qui l’amènera chaque soir sucer le clitoris à de petites putes en chaleur.

Enfin, les divisions au sein de l’armée togolaise, qui n’est pas unie derrière le Président. Une division encore accentuée par la célèbre affaire de Faure Gnassingbé contre son frère Kpatcha Gnassingbé, actuellement en prison, qui dispose aussi de ses éléments dans l’armée. Il faut y ajouter les mauvaises conditions de vie des militaires togolais, à part quelques officiers privilégiés. Ces chiens méchants affamés et frustrés n’auront aucun calcul à faire avant de se retourner contre ce régime qui les fait au jour le jour détester par le peuple togolais, sans les mettre à l’aise.

Mon très cher lecteur d’Icilome.com qui veut que je fasse un parallèle entre la révolution du monde arabe et celle du Togo, tu comprends donc que chez nous, cette révolution dont nous n’avons pas en fait besoin, ne ferait même pas une demi-journée pour aboutir à un résultat positif. Mais notre malheur, tu le sais bien, mon cher, ce sont nos leaders de l’opposition. J’espère que tu as suivi le scénario ridicule de l’une des toutes dernières marches de l’opposition où des jeunes militants d’un parti d’opposition auraient agressé des militants d’un autre parti d’opposition, les accusant de distribuer des tracts « Faure dégage, Faure démissionne » qui ne seraient pas des tracts de Jean-Pierre Fabre, le vrai opposant, mais ceux d’Agbéyomé, le faux opposant. Tu peux donc facilement imaginer l’après-révolution au Togo. Faure Gnassingbé, qui aura démissionné devant la révolte populaire, le slip mouillé d’urine, oubliant toutes ses copines, n’aura même pas encore pris l’avion pour l’exil, quand nos chers opposants commenceront à se disputer le fauteuil présidentiel, devant les yeux ahuris du peuple essoufflé par la contestation, et ceux fermés, à jamais, des morts jonchant les rues. Et, faute de compromis, ils referont appel à Faure Gnassingbé pour revenir prendre le fauteuil présidentiel, et les inviter à un dialogue… pour la formation d’un gouvernement d’union nationale.

Epilogue

La révolution des Togolais, qu’on baptisera sûrement la révolution des Eperviers – parce qu’il paraît que c’est un oiseau qui nous porte chance-, au lieu d’inspirer et galvaniser d’autres peuples, fera tout simplement rigoler le monde entier, tout comme la participation de notre équipe nationale de foot, Les Eperviers du Togo, à la Coupe du Monde 2006 en Allemagne.

1- Titre inspiré du titre du roman La ruine presque cocasse d’un polichinelle de l’écrivain camerounais Mongo Beti.


Ma haine s’appelle le Togo

 

Faure Gnassingbé

Depuis l’année passée, Ruth m’a toujours seriné. Son petit frère a un prof d’anglais togolais, dix fois plus sulfureux que moi, qui n’aime même pas parler de son pays, le Togo. Tout ce qui le lie désormais à son pays, affirme-t-il à ses élèves sans leur dire la raison, c’est son nom, qu’il changera d’ailleurs quand il en aura la moindre occasion, parce qu’il pense prendre la nationalité malienne. « Pourquoi n’aimez-vous pas votre pays, un pays qui vous forme si bien ? Ne veux-tu pas le rencontrer ? », me demande-t-elle toujours quand elle me parle de lui. Je lui réponds toujours par un sourire.

Il est très intelligent, très compétent, comme tous les vrais Togolais peuvent l’être au Mali. Jeune. La trentaine. Il a mis sur pied et dirige un grand club d’anglais qui rassemble des élèves d’une dizaine de lycées de Bamako. Il écrit des poèmes en français et en anglais et organise des concours de poésie pour les lycéens.

Si je veux le rencontrer ? Bah ! Les Togolais, surtout quand ils sont profs d’anglais, compétents et intelligents, et de surcroît parlent mal de leur pays, faut pas aller se jeter sur eux les trente-deux dents dehors parce qu’ils risquent de vous traiter comme un animal incomestible, vous foutre la plus grande humiliation de votre vie, quoi. Et, déjà par son nom qui m’a fait savoir de quelle région du Togo il vient ! Faut pas cacher certaines réalités, l’orgueil a toujours été notre péché mignon, nous les originaires du sud du Togo. Tu parles, on se connaît bien !

J’avais accueilli, le vendredi passé, avec joie, la carte d’invitation qu’il m’avait envoyée par Ruth qui lui avait parlé de moi, tentant coûte que coûte de nous rapprocher. Son club organisait une grande soirée dans une boîte de nuit bamakoise. Il m’y invitait.

Ruth accrochée, hélas, à mon bras – j’aurais aimé y aller seul, qui sait ?- je me présentai dans la boîte, samedi, autour de minuit.

Zaminamina hé hé, waka waka hé hé… Shakira qui ressuscite un vieux groupe africain pour la Coupe du Monde 2010. Déhanchements à vous donner des vertiges de petites lycéennes de dix-sept et dix-huit ans complètement dessinées dans leurs minis, à la grande joie de leurs petits amants hip-hopés… et sous les yeux avides de quelques vieilleries  – comme moi -, regrettant les années bonheur laissées depuis longtemps derrière. Ah, qu’on est heureux quand on est au lycée !

Ruth se faufila rapidement entre les danseurs et va s’accrocher aux bras d’un jeune homme tiré à quatre épingles assis avec  une jolie nana – une vraie malienne – à une table très bien garnie… C’était lui, donc !

– Mais, vous, je vous… euh, vous êtes…

Je ressemble à une vieille veuve devant la déclaration d’amour d’un beau jeune homme. Très étonné. Le jeune homme, suivi de sa belle minette, me tendant sa main que je serre mollement, est aussi étonné que moi, devant mon étonnement. Ruth et son frère sont aussi étonnés. Je continue de bégayer

– Vous aviez… Euh, vous étiez… Euh…

2001. Lycée de Tokoin, Lomé. Il était en terminale. On était en première. Mais on le connaissait. Presque tout le monde le connaissait sur le bloc de la série littéraire du lycée. Il était le président du club d’anglais du lycée. Le meilleur élève en anglais et en allemand de sa promotion depuis la seconde. Il parlait couramment, comme par magie, les deux langues vivantes. Il était notre référence. Notre idole. Notre dieu. Il avait obtenu le bac avec la mention Bien. Nous apprîmes qu’il avait obtenu une bourse pour le Maroc. Normal, comme la mention Bien au bac au Togo ouvrait normalement les portes du Maroc. Le noir du temps et de l’espace nous l’avait donc arraché. Je me suis toujours dit qu’il doit être en Occident dans un 3e cycle. Ou prof de fac…

– Euh, vous avez fait le lycée de Tokoin, non ?

– Oui, me fit-il en riant, vous me connaissez donc ?

Nous nous installâmes et commençâmes à bavarder en mina, notre langue maternelle, pour ne pas nous faire comprendre par notre entourage. Je le croyais au pire au Maroc, au mieux en Occident, que cherchait-il encore en Afrique, au Mali, avec ces élèves si tarés que même un âne n’envierait ? Qu’avait-il fait de sa bourse ? Je ne comprenais pas…

– Je ne suis pas en Occident, même pas au Maroc, mais là où tu me vois, au Mali. Je n’ai jamais obtenu cette bourse que m’offrait ma moyenne au bac. J’ai fait trois ans à l’université de Lomé, pour me retrouver avec un Deug II. J’ai jeté l’éponge après mon mystérieux échec à la licence. J’ai chômé pendant deux ans. Un de nos professeurs du Lycée de Tokoin m’a conseillé l’université de Bamako. Je suis arrivé en 2006, sans pouvoir m’inscrire, comme c’est trop cher. Trois cent mille francs comme frais de scolarité. De quoi payer un BTS au pays. Je me suis donc donné à l’enseignement et au Mali.

– Et que comptez-vous faire après ? ai-je demandé bêtement, toujours sous le coup de la stupéfaction.

– Après quoi ?

– Euh, je veux dire, quand allez-vous retourner au pays et…

– Ah, tu veux me parler du Togo ! Bon, ce que je compte faire, c’est de planter deux gosses à cette fille que tu vois – il me montra sa jolie gonzesse-, faire venir ma mère et ma sœur, et définitivement m’installer ici. Et vous ?

– Euh, je dois y retourner après mon master pour aller travailler, ai-je naïvement répondu comme si un travail me suppliait au Togo de venir le prendre, moi qui ai aussi connu deux ans de chômage après mon BTS.

– Ah, dévio loooooo – les enfants ! – Crois-tu que tu en trouveras, du travail, au Togo ? Ou nous ne parlons pas du même Togo ? me demanda-t-il en riant. Ou bien, on ne sait jamais, tu as quelqu’un en haut là-bas, hein, tu sais ce que je veux dire !

Oui, je savais ce qu’il voulait dire. Il voulait dire que le Togo n’a pas changé. Le Togo du népotisme qu’ont instauré Eyadema et sa sinistre bande n’a pas bougé d’un seul pas. Ce Togo qui l’a mordu, ce jeune homme si intelligent. Qui l’a définitivement dégoûté, et qu’il va jusqu’à la fin de sa vie détester. Je savais qu’il voulait parler de ce groupe d’idiots dix fois plus brutes que les animaux qui les ont engendrés, et qui ont transformé les entreprises publiques et institutions togolaises en poubelles qu’ils remplissent des vomissures qu’ils s’en vont chercher dans leurs crasseuses familles d’analphabètes.

– Savez-vous, lui fis-je en poussant un soupir de rage, c’est triste, mais il faut que nous…

– Il n’y a rien à faire, mon frère, ce que vous pouvez faire, c’est de vous accrocher à cette belle fille – il désigna Ruth-, faire venir vos parents, vos frères et sœurs, chercher la nationalité malienne pour le bien de vos enfants, et oublier. Tout oublier de ce Togo.

Il se leva, prit par la taille sa belle nana qui se jeta dans ses bras, se dirigeant vers la piste de danse, zigzagant sur les cris de Phil Collins qui hurlait Find a way to my heart. Je regardai Ruth qui me fixait en souriant.

– Vous vous connaissiez ? me demanda-t-elle.

– Oui, on a fait le même lycée. Et on est de la même région.

– Bizarre ! Pourquoi n’aimez-vous donc pas votre pays ?

Pour toute réponse, je lui tendis les deux mains qu’elle s’empressa de prendre, ayant compris que je voulais danser avec elle.